Recours en appel suite à démission d’office d’un conseiller
Les points à l’ordre du jour et les compléments d’information fournis pour lesquels Vivianne Wirbel souhaitait délibérer sont les suivants :
- Autorisation d’ester en justice pour donner suite à au recours en défense contre l’appel de Clément Rollot ;
- Recherche d’un avocat et paiement des factures présentées ;
- Demande pour solliciter la protection juridique de la commune.
En début d’examen de ces points , Vivianne Wirbel informe le conseil municipal que celui-ci ne devait se prononcer que sur le paiement de la facture d’avocat et le recours à la protection juridique.
Vivianne Wirbel, maire est intervenue dans la procédure d’appel contre le jugement du tribunal, a sollicité un avocat et acceptée le paiement par la commune sans avoir demander l’accord du conseil municipal ni l’avoir informé avant de présenter ces délibérations.
A la suite d’un débat, quatre conseillers présents représentant plus du tiers du conseil municipal ont demandé un vote à bulletin secret, ce qui est parfaitement légitime (voir la deuxième partie de cet article),
Vivianne Wirbel, maire, Jean-Paul Denis 1er adjoint, Christophe Munier 2ème adjoint et Cédric Waligunda refusent de participer au vote ce qui revient à s’abstenir (voir texte ci-dessous).
Vivianne Wirbel dépose des bulletins de vote en tas devant les autres conseillers en leur signifiant de se débrouiller. Devant cette attitude négative et préoccupante pour l’application de la démocratie dans notre commune, Claudine Machal, Maria Paiva, Clément Rollot, Jacky Dimnet et Damien Simonnet représenté s’abstiennent à leur tour.
Aucune majorité ne se dégageant pour cette délibération (9 abstentions, 0 bulletin exprimé) la délibération concernant le paiement des frais d’avocat est rejetée.
Quelles sont les conditions d’adoption des délibérations ?
Définitions et remarques préalables
L’adoption des délibérations nécessite tout d’abord un débat préalable et un maire ne peut imposer qu’un point de l’ordre du jour ne donne pas lieu à débat (TA Pau, 7 juin 2005, Brethes et autres).
Le vote peut se définir comme la manifestation de l’expression du conseil municipal.
Le scrutin n’est qu’une modalité de vote légalement encadrée. Deux types de scrutin sont prévus par le CGCT : le scrutin public et le scrutin secret.
Mise à part ces deux cas de figure où la manifestation de la volonté du conseil municipal est précisée par le code, il n’existe pas de formalisme de vote particulier.
L’adoption d’une délibération n’est même pas soumise à un vote formel préalable. Après un débat effectif, même succinct, faisant suite à une question précise du maire, la délibération est adoptée dès lors que l’assentiment de la totalité ou de la majorité des conseillers a pu être constaté par le président de séance (voir en ce sens CE, 28 juillet 1993, n° 135903 ; CE, 22 mars 1996, n° 115127).
Le cas des délibérations rattachées
Les délibérations sont dites « rattachées » dès lors qu’elles ne figurent pas à l’ordre du jour, qu’elles n’ont pas été régulièrement débattues et qu’elles portent toutefois la date du jour où une séance de conseil municipal a eu lieu. C’est pourquoi on les dit rattachées à la séance au cours de laquelle elles auraient dû être discutées, si, par négligence ou erreur, le maire n’avait pas omis de les y inscrire. C’est en effet, dans le but de réparer une faute matérielle que, le plus souvent, il est procédé de cette façon.
C’est parfois à une séance fictive du conseil municipal que ces décisions sont attribuées (CE, 11 avril 1986, n° 60580 : « la délibération portée au registre municipal à la date du 21 décembre ne correspond à aucune réunion du conseil municipal valablement tenu à cette date », le maire avait « raccroché » à une réunion, qualifiée de réunion d’information par le juge, une séance du conseil municipal lors de laquelle le quorum n’avait pas été atteint).
Les délibérations, qui résultent d’une telle procédure, sont prises en dehors de toute volonté clairement exprimée par le conseil municipal. Le juge a reconnu, de plus, que le fait de faire adopter par l’assemblée délibérante, dans une séance ultérieure, lesdites délibérations « avec effet de la date de leur rédaction, ne saurait entraîner régularisation des actes dont il s’agit » (CE, 4 février 1991, n° 68137). Il s’ensuit que, portée devant la juridiction administrative et/ou la juridiction pénale, cette pratique peut être sanctionnée et, ce, de façon concomitante.
Le juge administratif a, ainsi dans l’arrêt précité du 4 février 1981, retenu dans ses considérants que « le maire a expressément reconnu qu’aucune délibération du conseil municipal n’est intervenue aux dates indiquées sur les questions traitées et qu’il a lui-même rédigé ces prétendues délibérations en dehors d’un conseil municipal ». Dès lors, il en conclut au rejet de la demande de la commune tendant à annuler le jugement du tribunal administratif, mais en plus, il applique les amendes prévues en cas de recours abusif.
Le juge pénal, quant à lui, peut qualifier ces délibérations qualifiées de faux au sens de l’article 441-1 du code pénal. Ainsi, la chambre criminelle de la cour de Cassation, dans un arrêt du 27 février 1984, a considéré que « constituait un faux en écriture publique, (…), le fait, par un maire de faire établir et de signer, pour l’adresser au préfet, un extrait du registre des délibérations du conseil municipal de la commune d’Auneau relatant une délibération dont ce registre ne contient aucune trace et dont il est établi qu’elle n’a donné lieu a aucun procès-verbal ».
Le faux et l’usage de faux sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45000 € d’amende (article 441-1 du code pénal).
Le calcul de la majorité absolue
Comme le rappelle l’article L.2121-20, les délibérations sont prises à la majorité absolue des suffrages exprimées et non des votants ce qui exclut les bulletins blancs. Les abstentions ne sont pas comprises dans ce décompte. Le refus de prendre part au vote n’a d’autre signification qu’une simple abstention (Rép. Min. n° 26978, JO A N du 27 janvier 2004). Par ailleurs, la mention au procès-verbal de ce refus n’a rien d’obligatoire (Rép. Min. n° 49261, JO AN du 7 décembre 2004).
Par majorité absolue, il faut entendre le nombre de suffrages favorables à la proposition de délibération faite par le maire, nombre qui doit être supérieur à la moitié c’est-à-dire plus de la moitié.
La preuve de cette majorité est constituée par la mention qui figure au procès-verbal de séance ou dans le corps de la délibération. A titre d’exemple, si sur 11 suffrages exprimés, 6 sont favorables, la délibération est adoptée.
Deux suffrages exprimés concordants peuvent suffire pour qu’il y ait la majorité absolue permettant l’adoption d’une délibération. Dans ce cas, la majorité absolue correspondra à l’unanimité des suffrages exprimés.
Un seul suffrage exprimé ne permet donc pas d’adopter une délibération faute d’existence d’une majorité absolue.
Le partage des voix
En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante (article L.2121-20). En d’autres termes lorsqu’il y a une stricte égalité entre les voix « pour » et les voix « contre », la voix prépondérante du président fait que la décision est acquise dans le sens où ce dernier exprime son vote.
Si deux suffrages sont exprimés et que, dans ceux-ci, se trouve celui du maire votant dans un sens, et celui d’un conseiller votant dans l’autre sens, il y aura partage des voix. Mais la décision sera tout de même adoptée en raison de la prépondérance de la voix du président.
En cas de scrutin secret, la voix du président n’est jamais prépondérante (article L.2121-20). Le vote est alors bloqué.
Le vote ordinaire
Il s’agit du vote à main levée qui va être utilisé tant qu’un scrutin public ou secret n’est pas demandé. L’opinion est exprimée par un levé de main à la question posée par le président de séance (qui est contre, qui s’abstient, qui vote pour).
Le vote n’est pas utile si le consentement explicite, unanime ou majoritaire peut être constaté sans contestation (CE, 22 mars 1996, n° 115127).
Le scrutin secret
A la demande du tiers des membre
Selon l’article L.2121-21, le vote à scrutin secret a lieu si le tiers des membres présents le demande. Dans ce cas, la demande porte toujours sur un vote particulier et non sur l’ensemble des délibérations d’une séance.
Le tiers se calcule en fonction des membres effectivement présents. Ne sont pas pris en compte les conseillers absents ou représentés. La demande obéit à ses propres règles, le scrutin proprement dit aux siennes. C’est ainsi que les présents peuvent être en nombre inférieurs aux suffrages ultérieurement exprimés compte tenu des procurations (CE, 26 novembre 1948, Ourliac, Rec. Lebon 443).
Sur proposition du maire
Il peut être procédé au scrutin secret sur proposition du maire à condition que sa proposition soit approuvée par un tiers des membres du conseil (TA Dijon, 12 janvier 1993,Volatier). Toutefois, le maire ne peut pas seul décider de ce type de scrutin sous peine d’illégalité de la délibération (TA Lyon, 22 novembre 1989, Taton et a.,Rec. Lebon T. 507)
Nominations et présentations
C’est également le type de scrutin qui permet de procéder à des nominations ou présentations. Dans ces derniers cas, si aucun des candidats n’a obtenu la majorité absolue après deux tours de scrutin secret, il est procédé à un troisième à la majorité relative. En cas d’égalité des voix, l’élection est acquise au plus âgé.
Néanmoins, le conseil municipal peut décider, à l’unanimité, de ne pas procéder au scrutin secret pour les nominations ou les présentations, sauf dispositions législatives ou réglementaires prévoyant expressément ce mode de scrutin.
Si une seule candidature a été déposée pour chaque poste à pourvoir au sein des commissions municipales ou dans les organismes extérieurs, ou si une seule liste a été présentée après appel de candidatures, les nominations prennent effet immédiatement, dans l’ordre de la liste le cas échéant, et il en est donné lecture par le maire.
Scrutin secret obligatoire
Le scrutin secret est de plein droit obligatoire s’il y a lieu de procéder :
– à l’élection du maire et des adjoints (article L.2122.7) ;
– à la désignation des délégués de la commune dans des organismes extérieurs tels qu’un syndicat de communes (article L.5211.7).
Le scrutin public
Il a lieu, pour un vote précis, quand il est demandé par le quart des membres présents. Il ne peut avoir lieu pour tous les votes d’une séance sauf à ce que la demande soit renouvelée pour chaque adoption de délibération. Le scrutin public ne signifie pas que le vote se déroule en présence du public. Il signifie que les noms des votants avec le sens de leur vote sont mentionnés dans le procès-verbal de séance (article L.2121-21). En cas de procuration, le nom du conseiller absent ainsi que le vote du mandataire doivent être indiqués.
Chaque conseiller, à l’appel nominatif, fait connaître publiquement son vote (pour, contre ou abstention).
S’il y a simultanéité entre une demande de vote au scrutin public et au scrutin secret, c’est cette dernière qui l’emporte dès lors qu’elle est présentée par le tiers des membres même si la demande de vote au scrutin public est formée par un nombre plus élevé de conseillers (CE, 15 mai 1908, Souet, Rec. Lebon 511).
Le vote du compte administratif
Dans la mesure où, en application de l’article L.2121-14, le maire doit se retirer au moment du vote, le nombre de conseillers restants peut être pair, d’où un risque de partage de voix.
L’article L.1612-12 prévoit, pour éviter un tel cas de figure, que le compte administratif est arrêté dès lors qu’une majorité des voix ne s’est pas dégagée contre son adoption. Grâce à ce système où l’on ne décompte que les voix « contre », le compte administratif est considéré comme adopté en cas de partage des voix (Rép. Min. n° 4982, JO Sénat du 10 août 1989).
Complément de lecture
En cas de vote à bulletin secret, la loi engagement et proximité du 27 décembre 2019 précise que tout conseiller municipal atteint d’infirmité certaine et le mettant dans l’impossibilité d’introduire son bulletin dans l’enveloppe est autorisé à se faire assister par une personne de son choix. Voir la question n° 22 :« Comment sont transcrites les délibérations de l’assemblée délibérante ? ».